Parent violent, parent blessé

Face à un parent violent, personne n’est indulgent. Pourtant, on est très loin d’imaginer qu’un parent violent puisse avoir été un enfant blessé. Alors, nous allons tenter ici de regarder de plus près ce que nous apprend les neurosciences à ce sujet.

Parent violent 

Le parent violent est avant tout un parent. Il a lui-même été enfant. Devenu parent et lié à son enfance, il porte en lui, les bagages de tout ce qui a fait son enfance notamment ses rapports avec ses parents ou avec les personnes qui étaient censées prendre soin de lui dans son enfance ainsi que ses rapports avec d’autres personnes de son entourage familial. La violence dont on le qualifie est essentiellement dirigé vers son enfant ou ses enfants. C’est ainsi qu’on le qualifie de parent violent. Cette violence peut s’exprimer sous formes d’abus, de maltraitance, de négligences à l’égard de sa progéniture. Ces sévices (violences ou maltraitances) font donc partie de son mode de fonctionnement. Plus fort que lui, les sévices qui lui ont été infligés dans son enfance font leur chemin chez lui tout en prenant une place importante dans son mode de fonctionnement.

Très loin d’une remise en question, ce parent réagit à son tour de manière violente face à ses enfants. Pour lui, la moindre demande d’affection, de proximité ou d’attention de la part de son enfant ou de ses enfants sont considérés comme une attaque. Et, cette attaque enclenche chez lui, un mécanisme de défense qui lui fait réagir en s’attaquant à son tour à ses enfants. Malheureusement pour lui, il est devenu parent sans s’être donné les moyens de se défaire de tous ces maux qui ont été parsemés dans son enfance. Malheureusement pour lui, il est devenu parent sans avoir été aidé à se reprendre en mains ou à repenser son mode de fonctionnement.

Dérèglement de la régulation de ses émotions

Dans son enfance, le parent « violent » n’a pas eu la chance d’avoir des parents bienveillants, des parents qui écoutaient ses émotions, ses sentiments et qui l’aidaient à les exprimer. Ce parent violent n’a pas eu des parents qui étaient attentifs, à l’écoute de ses besoins émotionnels. Ses besoins de sécurité affective, ses besoins de se sentir aimé, chéri, d’être câliné, d’être écouté, de se sentir unique aux yeux de ses parents, n’ont pas été correctement comblés. Ce qui a induit chez lui, l’une des conséquences néfastes pour sa santé psychologique, le dérèglement de ses émotions. Raison pour laquelle, face à ses propres émotions ou à celles de sa progéniture, il réagit par la violence. 

Le dérèglement dans la régulation de ces émotions est dû à un défaut de fonctionnement d’un certain nombre de circuits du cerveau. Il existe dans les cerveaux humains, des circuits neuronaux qui ont des fonctions bien précises. Par exemple, le circuit neuronal appelé « système limbique » est formé des zones cérébrales telles que l’hippocampe, l’amygdale et l’hypothalamus. Ce circuit joue un rôle majeur dans la mémoire, dans la régulation des émotions mais aussi dans l’élaboration des comportements. A ce circuit s’ajoute la zone préfrontale et le cortex cingulaire antérieur qui sont aussi impliqués dans la régulation des émotions et dans la construction des relations sociales. La communication entre ces différentes zones et ces différents circuits est réglée par les connexions synaptiques. Si le parent est négligeant ou maltraitant à l’égard de son enfant, ces connexions neuronales ne vont pas se construire correctement et l’enfant aura des difficultés dans la régulation de ses émotions, dans la construction de relations sociales et dans la compréhension des émotions des autres. 

Des études scientifiques le démontrent

La littérature scientifique en neurosciences est très riche sur la question des conséquences des maltraitances infantiles ou les négligences subies par les enfants. L’étude de la psychologue Rebecca Walter en 2013, a montré que la relation empathique, bienveillante et soutenante face à un enfant est la condition nécessaire pour que le cerveau de cet enfant puisse se développer de façon optimale. Dans la même optique, l’étude de Catherine Guéguen (2017), pédiatre spécialisée dans l’éducation, a également montré que la relation de bienveillance entre le parent et son enfant, est une condition nécessaire au bon développement du cerveau de l’enfant. Ce qui induit de très faibles difficultés dans la régulation des émotions. 

On peut donc comprendre que si la relation parent-enfant dans les premiers mois et dans les premières années de vie de cet enfant n’est pas riche en attention, en bienveillance, en échanges affectifs, les circuits neuronaux auront du mal à fonctionner de façon optimale chez l’enfant. Ou encore, le fonctionnement de ces circuits serait défaillant sur la question de la régulation des émotions, d’élaboration des comportements et la construction des relations sociales. Le cerveau de l’enfant étant en plein processus d’élaboration dans ses premiers mois de vie et dans ses premières années de vie, chaque expérience affective ou relationnelle avec son parent a un profond impact sur son cerveau et plus particulièrement sur ses circuits neuronaux. Les expériences affectives et relationnelles bienveillantes consolident les connexions neuronales et participent à la maturation du cerveau de l’enfant. 

Conclusion 

A la lecture de ces éléments, vous aurez compris que le parent qui attaque son enfant en étant violent, maltraitant ou abusif n’est pas nécessairement un parent sans cœur ou un parent qui n’aime pas son enfant. C’est un parent qui a été aussi brutalisé, négligé ou maltraité dans son enfance. La bonne nouvelle face à cette difficulté c’est qu’il est possible d’y remédier. Plusieurs techniques neuro comportementales et de nombreuses thérapies peuvent être salvateurs pour s’extirper de ce mode de fonctionnement violent. L’important, c’est de prendre conscience qu’il y a des choses à mettre au travail et le reste s’en suivra. Le parent violent pourra se ressaisir et modifier ses façons de réagir face aux demandes de son enfant. Et, en apprenant d’autres façons de réagir, ses circuits cérébraux vont se restructurer et d’autres connexions neuronales vont se construire.

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